dédaigneux, euse

• 1Qui a du dédain. Dédaigneuse princesse. [Racine, Phèdre] Cet homme est abstrait, dédaigneux, et semble toujours rire en lui-même de ceux qu'il croit ne le valoir pas. [La Bruyère, I] D'un peuple industrieux les talents mercenaires De mon goût dédaigneux ne sont plus tributaires. [Voltaire, Les Scythes] Et notre langue même, à tout esprit vulgaire De nos vers dédaigneux fermant le sanctuaire, L'avertit tout d'abord que, s'il y veut monter, Il doit savoir tout craindre et savoir tout tenter. [Chénier, l'Invention.]

  Substantivement. C'était par faiblesse qu'il faisait le dédaigneux. [Bossuet, Avert. 6]

• 2Se dit, en parlant des femmes, de celles qui n'ont aucun regard pour les hommages des adorateurs. Il se trompait pourtant sur le caractère de Formosante, elle n'était pas si dédaigneuse qu'elle le paraissait. [Voltaire, La princesse de Babylone]

  Substantivement. Elles aiment ailleurs, ces belles dédaigneuses. [Corneille, Agésilas] C'était ceci, c'était cela ; C'était tout ; car les précieuses Font dessus tout les dédaigneuses. [La Fontaine, Fables]

• 3Qui exprime le dédain. Une réponse dédaigneuse. Mais tu sais bien aussi de quel oeil dédaigneux Je regardais ce soin d'un vainqueur soupçonneux RAC. Phèd. II, 1. Cela lui sied fort bien, et cet air dédaigneux Qu'elle a pris à la cour, lui sied encore mieux. [Regnard, Démocrite] Silence dédaigneux. [Voltaire, Octave et le jeune Pompée, ou Le triumvirat] Courroux dédaigneux. [Voltaire, Tancrède] Le portier, qu'on aurait pris pour un grand seigneur, les introduisit avec une espèce de bonté dédaigneuse. [Voltaire, Zadig, ou La destinée] Il se retira en me jetant un coup d'oeil dédaigneux accompagné d'un souris moqueur. [Marivaux, Le paysan parvenu] Acquérez le droit d'être dédaigneux, et ne le soyez pas. [Diderot, Salons de peinture] J'y insérai une petite note assez dédaigneuse qui mit Vernes en fureur. [Rousseau, Les confessions] C'est la sévérité despotique, c'est la dédaigneuse médiocrité de ma belle-mère. [Staël, Corinne, ou l'Italie]
• 4Dédaigneux de, qui dédaigne, qui néglige. Tout monarque indolent, dédaigneux de s'instruire, Est le jouet honteux de qui veut le séduire. [Voltaire, Poèmes et épîtres] Je me flattai longtemps que, fidèle à sa gloire, Dédaigneux de sa vie et regardant l'histoire, Fiesque.... Vengerait Gêne esclave et nos droits envahis. [Ancelot, Fiesque, I, 4] De ces riches atours une autre [plante] dédaigneuse Laisse à ses soeurs l'azur, la pourpre, le saphir, Et se livre sans voile aux baisers du zéphyr. [Delille, Les trois règles de la Nature] On était si préoccupé des affaires politiques, si dédaigneux de la poésie, que les vers admirables de Thompson restèrent d'abord ignorés du public et du protecteur que le poëte avait invoqué. [Villemain, Litt. fr. XVIIIe siècle, 2e part. 2e leçon.]
• 5 Terme d'anatomie. Le muscle dédaigneux, et, substantivement, le dédaigneux, le muscle droit externe de l'oeil ; ancien nom de ce muscle qui tire l'oeil en dehors et de côté.